Les jeux en famille, un plaisir...Jusqu'au moment ou les perdants se mettent à bouder.
Pourquoi est-ce si dure de perdre ? Comment motiver les enfants à poursuivre le jeu même s'ils ne gagnent pas ?
On fait le point avec Stephan Valentin, docteur en psychologie et specialiste de la petite enfance, auteur du livre Du Jeu au Je (Enrick B Editions- décembre 2017)
Pourquoi est-ce si difficile de perdre ?
Stephan Valentin : "Celui qui gagne se trouve pour un certain moment au centre de l’attention. Tout le monde aime cette sensation.
Savoir accepter la victoire de l’autre quand on perd demande une bonne estime de soi: “J’ai des qualités, j’arrive à faire des choses et puis parfois je ne suis pas bon”. Pour un enfant, une défaite peut entraîner une peur de montrer des faiblesses, d’être victimes de moqueries des autres joueurs."
Ça existe un enfant qui perd sereinement ? C’est souhaitable ?
Stephan Valentin : "Qu’un enfant arrive à gérer les défaites sans rentrer dans une colère et à continuer à jouer même s’il sent qu’il va perdre est certainement le signe que son seuil de frustration est élevé. Oui, c’est positif pour l’enfant et plus agréable pour les autres joueurs. Cela dit, perdre sereinement pourrait envoyer aussi le signal que finalement, l’enfant ne peut-être pas vraiment impliqué dans le jeu."
Vous écrivez que le jeu est « Une action qui suit des règles et crée une motivation intérieur », ça n’est pas forcément celle de gagner ?
Stephan Valentin : "Je pense qu’avant tout c’est le plaisir de jouer ensemble. Gagner c’est une chose, mais passer du temps avec les copains en s’amusant et en respectant l’autre est probablement un enjeu plus important encore."
Jouer c’est apprendre des compétences sociales, est-ce que c’est particulièrement vrai quand il y a cet enjeu de perdre ou de gagner ?
Stephane Valentin : "Oui, car on entraîne des compétences sociales comme l’esprit d’équipe et l’empathie en jouant. De plus, par cette motivation de gagner, on reste ensemble autour d’une table, cela fait appel à l’ambition. On se regarde également dans les yeux et surtout on a beaucoup de plaisir à être ensemble. Cela favorise l’interaction avec l’autre, l’échange. De plus, en jouant, on apprend à être à l’écoute de l’autre et on devient plus patient. Par exemple en attendant son tour."
Que pensez-vous des jeux « collaboratifs » ? Ceux qui préservent de la défaite individuelle ?
Stephan Valentin : "Oui, je pense que lorsque l’enfant n’arrive pas à supporter l’échec ou une défaite, ce type de jeux peut justement l'aider à mieux les vivre. Quand on perd en équipe, on se soutient mutuellement.
Ou deux enfants peuvent jouer contre un adulte. Cela aide à prendre l’adulte comme modèle. Surtout quand il continue à jouer quand il est est en train de perdre, par exemple."
Avez-vous quelques conseils très pratiques pour les parents de mauvais perdants ?
Stephan Valentin : " En tant que parent on peut servir de modèle pour son enfant et lui montrer comment on arrive à gérer une défaite.
Les jeux de rôles peuvent aider l’enfant à vivre différentes qualités. Un jour on est un roi puissant. Le jour suivant un pauvre mendiant.
Jouez à des jeux qui sont conseillés pour la tranche d’âge de l’enfant pour augmenter ses chances de maîtriser le jeu et donc de gagner.
Il faut un équilibre entre victoire et défaite quand les parents jouent avec leur enfant. On peut parfois laisser gagner l’enfant. C’est au parent de doser la frustration, sans toutefois l’en protéger. Arriver à gérer la frustration doit faire partie du développement chez l’enfant."
Pour en savoir plus sur le Jeu comme outil de construction de soi
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