C’est écrit dans les livres : « le dessin vient du monde interne de l’enfant, c’est une activité naturelle chez lui dès 2 ans ». Je ne le gronde donc que très modérément quand il s’empare des feutres de ses grands frères pour… comment dire… « personnaliser » le mur de sa chambre…
Je vois bien qu’il est fasciné par sa production, le voici ‘acteur’ de quelque chose et son regard débordant de fierté me dit clairement « regarde, c’est MOI qui produit ! ». Quelle jouissance !
Le dessin pas à pas, notions de psycho
Alors je replonge dans mon livre et je m’imprègne de quelques âges de références (et tant pis si ma merveille ne s’y conforme pas au mois près) : « à 2 ans, l’enfant est capable d’imiter une ligne verticale, à 2 ans et demi l’horizontale et la spirale, à 3 ans les premiers ronds bien fermés, à 5 ans le triangle, à 6 ans le losange ». Ahhh, OK ! Je comprend mieux toutes ces frises et mandalas qu’ils font au kilomètre à la maternelle !
D’une esquisse de bonhomme…
Quant au fameux bonhomme, comme tout le monde j’ai eu droit au têtard, puis à quelques détails vers 3 ans et demi : yeux, bras, jambes, c’est-à-dire la bonne vieille tête de toto avec 4 tiges qui représentent les membres. Vers 4/5ans, j’ai vu pointer quelques nombrils sur les super-héros de Stan, parfois même la preuve désarçonnante de la réalité masculine à travers leur pantalon ! Stan croit utile de prendre en compte ce qu’il sait de son sujet et pas seulement ce qu’il voit. Ça s’appelle la « transparence » paraît-il, soit !
…A un dessin volontaire
Quant aux notions de mouvement et de perspective, on me dit qu’elles viendront plus tard, respectivement vers 8 et 12 ans, j’attendrai le temps qu’il faudra. En tout cas, bonhomme ou pas, pour Martin, mon aîné, le dessin est désormais « volontaire » mais reste très abstrait ; je repère quand même par-ci par-là quelques éléments significatifs qui me mettent sur la piste : « je vois des dents et une queue mais oui, bien sûr mon chéri, c’est un loup, ça crève les yeux ! ».
Je prends patience car je sais que ses représentations du monde seront de plus en plus fidèles à la réalité. C’est écrit dans mon livre !
Le dessin comme cadeau
Il n’y a qu’à voir la mise en scène soigneusement montée par mon enfant au cours de la production et/ou de la présentation de son dessin pour prendre toute la dimension du cadeau qu’il me fait lorsqu’il m’offre son dessin : « interdit d’entrer dans ma chambre ! » (comprendre : « surprise en cours de réalisation »), « prête moi ton stylo fluo jaune, j’ai un truc à faire mais je ne te dis pas quoi » et, après un suspense interminable, « ferme les yeux et ouvre tes mains… ça y est tu peux regarder ! ». C’est sa production qu’il m’offre, non sans une certaine fierté alors je me dois d’accuser réception de ce don avec enthousiasme. Plus tard, il ira acheter ses cadeaux dans une boutique et ça n’aura pas le même charme…
Mieux que des mots ou avec des mots
Quand je scrute de plus près la production de nos artistes en herbe et que je regarde au-delà du gribouillage du petit, j’y vois des formes plus ou moins imaginaires, des couleurs, des humeurs, un mot d’amour, des tentatives de ‘graphisme alphabétique’, des spirales infinies. Et si je demande à chacun de donner du sens à son œuvre, c’est une autre porte que j’ouvre : celle de l’histoire qu’ils auront envie de me raconter.
Me voici riche d’un sacré trésor ! Alors j’ai acheté récemment un grand cahier pour chacun d’eux. J’y colle leurs dessins (datés), sans commentaires ni gommettes superflues, et je leur en ferai cadeau à mon tour, plus tard.
Vous avez aimé ? Dites-le en commentaire !